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Dans le monde
Énergie : le gaz source de conflit
Les États-Unis et l’Union européenne ont annoncé le 25 mars un nouvel accord énergétique, qui prévoit une augmentation très importante des livraisons de gaz de schiste américain, en remplacement du gaz russe. Cet accord est une étape de la guerre économique que se mènent depuis des années l’État russe et la bourgeoisie américaine pour la distribution du gaz en Europe.
L’accord prévoit une augmentation des livraisons de 15 milliards de mètres cubes cette année, et de 50 milliards à partir de l’an prochain. Par comparaison, l’Europe importait auparavant de Russie environ 150 milliards de mètres cubes de gaz par an. De façon concomitante, le gaz de schiste américain, plus cher, se vendait relativement peu en Europe.
L’impérialisme américain étant loin de se satisfaire de cette situation, cela fait des années qu’il exerçait diverses pressions pour permettre l’accès de ses entreprises gazières au marché européen. Le gouvernement des USA s’opposait notamment à la construction du gazoduc Nord Stream 2, propriété de l’entreprise russe Gazprom, qui aurait permis de doubler les importations de gaz russe en Allemagne.
Les États-Unis étaient déjà parvenus à obtenir de l’Allemagne et de plusieurs autres pays européens la construction de terminaux méthaniers spéciaux, des investissements lourds permettant l’importation du gaz américain aux dépens du gaz russe. Sur le terrain, des ingénieurs allemands qui travaillaient sur le Nord Sream 2 ont témoigné de menaces physiques reçues de la part d’espions américains, et cela donne une idée des pressions subies.
À peine terminé, le nouveau gazoduc vient d’être enterré par le gouvernement du chancelier Olaf Scholz, suite à l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe. Les entreprises américaines ont ainsi remporté leur bataille contre Gazprom.
La guerre en Ukraine est ainsi l’occasion pour l’impérialisme américain de supplanter les positions économiques de la Russie. L’âpreté des tensions militaires, politiques et économiques entre ces deux puissances s’est traduite aussi par le renforcement des bases militaires de l’OTAN aux frontières russes. Si le dernier pas a été franchi par Poutine, il doit être compris dans ce contexte.
Mais les répercussions de la nouvelle donne gazière se verront aussi dans l’avenir. Le marché européen est au cœur des rivalités des géants du gaz et va continuer à le rester. Les chiffres montrent que les importations de gaz de schiste américain ne suffiront pas à remplacer le gaz russe, ce qui sera un facteur de tensions entre États européens et de déstabilisation. Les risques de guerre sur le vieux continent, loin de s’amoindrir, sont ainsi aggravés.