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Grande-Bretagne : la grève des cheminots montre la voie
Mardi 21, jeudi 23 et samedi 25 juin, des dizaines de milliers de cheminots ont fait grève en Grande-Bretagne pour des augmentations de salaire et contre des suppressions d’emplois.
Mardi 21, paralysant les transports dans la capitale, la grève des employés du métro a été un des moments marquants de cette grève, d’une ampleur jamais vue depuis trente ans.
La principale revendication des grévistes est une hausse des salaires de 7 % pour faire face à l’inflation, qui est en fait déjà en train de dépasser la barre des 10 %. Ils s’opposent aussi à un plan de 3 500 suppressions d’emplois chez Network Rail, structure publique créée en 2002 pour reprendre la maintenance des infrastructures que la privatisation du rail, en 1993-1994, avait sévèrement dégradée. Ils dénoncent enfin la fermeture programmée des guichets dans les gares, ainsi que la dégradation des conditions de travail et le bas niveau des pensions de retraite.
Pendant cette semaine de grèves, le gouvernement conservateur de Boris Johnson a accusé les cheminots d’être des égoïstes, qui saboteraient une indispensable réforme et modernisation du rail. Il a menacé de durcir la législation en facilitant le recours aux intérimaires pour assurer un service minimum et en augmentant les amendes infligées aux syndicats en cas de grève illégale.
Quant aux médias, les plus réactionnaires en tête, ils ont répété en boucle que le salaire médian dans les chemins de fer serait de 44 000 livres (51 000 euros) par an, sans bien sûr préciser que ce calcul inclut directeurs, cadres et conducteurs, et qu’il n’inclut pas certains des agents les moins bien payés, comme les femmes de ménage. Ils ont tenté de malmener Mick Lynch, le secrétaire national du syndicat des transports RMT, qui, en leur tenant tête, est devenu en quelques jours une célébrité que désormais de nombreux travailleurs verraient bien Premier ministre !
Du côté de l’opposition, le leader du Parti travailliste, Keir Starmer, a menacé de représailles tout député Labour qui serait vu sur un piquet de grève. Il ne veut évidemment pas être soupçonné de soutenir les luttes des travailleurs alors qu’il n’aspire qu’à revenir au pouvoir pour gérer les affaires de la bourgeoisie.
Heureusement, sur les piquets de grève, les cheminots ont eu droit à des marques de soutien autrement valables : celles de travailleurs se reconnaissant dans leur combat. Ainsi, devant la grande gare londonienne de King’s Cross, des enseignants, des soignants ou encore des postiers ont tenu à apporter aux grévistes à boire ou à manger, à se tenir à leurs côtés sur le piquet le temps d’une discussion. De telles scènes se sont reproduites aux quatre coins du pays.
La grève a été réussie bien qu’elle ait été appelée par un seul syndicat (le RMT), qu’elle n’ait touché que 13 des 22 compagnies ferroviaires, et pas toutes les catégories du personnel. La démonstration est d’autant plus parlante : sans les travailleurs, rien ne fonctionne, et quand ils entrent en lutte ensemble, leur force de frappe est immense.
En se dressant contre les bas salaires et les licenciements, les cheminots pourraient encourager d’autres catégories de travailleurs à voter la grève prochainement, en particulier dans le transport aérien, les services postaux, l’éducation et la santé, où les salaires sont aussi à la traîne. Au-delà des grèves sectorielles qui se profilent, face à une hausse des prix qui frappe l’ensemble des classes populaires, c’est bien une grève de tout le monde du travail qui est à l’ordre du jour.