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Grande-Bretagne : Boris Johnson lâché par les siens
Jeudi 7 juillet, le Premier ministre conservateur britannique, Boris Johnson, a finalement été contraint de démissionner. Il a cédé à la pression et aux démissions de dizaines de membres de son gouvernement qui craignaient que son impopularité, liée à des scandales en cascade, ne déteigne sur eux.
Johnson, Premier ministre depuis la victoire des conservateurs aux élections législatives de décembre 2019, a donc renoncé à sa fonction de leader du parti. Mais il restera Premier ministre jusqu’à ce que les conservateurs se soient trouvé un nouveau chef, comme le veulent les us et coutumes du système institutionnel britannique. Johnson, aussi décrié soit-il dans son propre camp et dans la population, pourrait occuper le fauteuil de Premier ministre jusqu’à l’automne ! Cette farce en dit long sur ce que vaut « la plus vieille démocratie du monde ».
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase est dérisoire : Johnson a reconnu, après avoir soutenu le contraire, qu’au moment de promouvoir un député de son parti, il savait que celui-ci avait fait des « avances inappropriées » à deux collègues masculins. Ce petit mensonge serait passé inaperçu s’il ne s’inscrivait dans une très longue série. Or le vase était bien plein, surtout depuis le Partygate, à savoir la révélation qu’en 2020, Johnson et ses proches avaient, en plein confinement, bafoué les règles imposées au commun des mortelset fait la fête à de nombreuses reprises dans des locaux gouvernementaux.
Il y a déjà onze candidats à la succession. Le futur Premier ministre sortira d’obscures tractations dans lesquelles la population n’aura pas son mot à dire. D’après les politiciens connaisseurs des traditions séculaires du parti conservateur, ce choix dépendrait de l’honneur et de l’intégrité de ses dirigeants. Parlant de Boris Johnson et de ses collègues, même s’ils l’ont désormais lâché, cela prête à sourire.
Autant dire que les travailleurs n’ont rien à attendre de cette compétition entre serviteurs de la bourgeoisie. Mais ils n’ont rien à espérer non plus d’éventuelles nouvelles élections. Selon les derniers sondages, si elles devaient se tenir demain, l’opposition travailliste serait gagnante. La cause en est d’abord que le rejet du gouvernement s’est accentué ces derniers mois, et pas seulement du fait des frasques de Johnson. Ce dernier avait promis monts et merveilles avec la mise en œuvre du Brexit. Lors du référendum de 2016, il avait réussi à leurrer certains travailleurs en leur faisant croire qu’ils auraient tout à gagner à un repli nationaliste. Aujourd’hui, ces derniers ne peuvent que se rendre à l’évidence : les milliards que Johnson avaient promis de réinjecter dans le système de santé font toujours défaut ; et le niveau de vie, loin de s’élever par la magie supposée de la rupture avec l’Union européenne, est en train de s’effondrer, l’inflation approchant des 10 %. Quant à l’exode de dizaines de milliers de travailleurs étrangers venus de l’UE, il a désorganisé l’économie sans fournir un seul emploi aux travailleurs britanniques.
Mick Lynch, le leader du syndicat RMT qui a organisé la grève des cheminots fin juin, a déclaré qu’il verrait bien Keir Starmer, le chef du parti travailliste, comme Premier ministre à la place de Johnson. Mais pour les travailleurs, un tel remplacement ne changerait rien. On l’a vu notamment de 1997 à 2010, sous Tony Blair et Gordon Brown, deux premiers ministres travaillistes qui ont largement contribué à la précarisation du monde du travail.
Quoi qu’il en soit, dans le cadre de ce système, la classe ouvrière ne peut mettre ses espoirs dans une élection. Sa mobilisation collective, comme le mouvement de grève qui a commencé dans les chemins de fer, et auquel s’oppose le parti travailliste, sera le meilleur levier pour s’opposer aux attaques contre le monde du travail.