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Leur société
Cars et bus : quelle pénurie de chauffeurs ?
Les parents d’élèves se plaignent des annulations de bus scolaires, tandis que les usagers des bus des villes moyennes et grandes sont confrontés à des attentes interminables pour monter dans des bus bondés, voire à des fermetures de lignes.
Selon une fédération patronale, la FNTV, il manquerait 8 000 conducteurs de bus scolaires en France sur un total de 30 000. 1,2 million d’enfants sont quotidiennement emmenés à l’école en bus. Pour le transport interurbain de voyageurs, les syndicats estiment qu’il manque 10 000 chauffeurs de bus.
Dans les grands médias, le patronat pleurniche sur la pénurie de personnel dans les métiers « difficiles ». En fait, il faut être en bonne santé et beaucoup de demandeurs d’emploi de longue durée ont des problèmes de santé que la médecine du travail estime incompatibles avec ce travail.
Les régions et les villes veulent réduire l’enveloppe finançant les transports en commun, et se servent pour cela des appels d’offres à la baisse et de la sous-traitance vers les sociétés du secteur comme Transdev, Keolis ou RATP-Dev. Ces dernières dégradent les conditions de travail, réduisent les primes et compensations en vigueur, voire les salaires, au prétexte de la concurrence. Cela entraîne des démissions, un service aux voyageurs encore plus dégradé, et des grèves, comme celle des conducteurs de bus de Vaux-le-Pénil, Vulaines, Lieusaint, en Seine-et-Marne, durant sept semaines en 2021.
C’est aussi ce qui se passe à la RATP, où il y a une hausse des démissions et abandons de poste chez les conducteurs de bus, dont les horaires viennent d’être dégradés et rallongés. Ils ont pour horizon des conditions de travail encore pires, lors du transfert des conducteurs RATP vers diverses filiales en 2025, une remise en cause de la grille des salaires et des droits à la retraite.
La direction de la RATP avait gelé les recrutements en 2021, calculant que la hausse du temps de conduite lui permettait de réduire les effectifs. Aujourd’hui, elle fait tout un cinéma pour recruter, allant jusqu’à proposer aux conducteurs en place une prime de 300 euros par recrutement parrainé. Mais les recrutements actuels ne sont pas une inversion de sa politique. Elle réagit à un problème ponctuel, lié aux démissions. La baisse de l’effectif reste programmée, accompagnant les nouvelles et futures conditions de travail dégradée.
Le problème vient aussi du salaire. La RATP clame qu’elle offre un salaire de 2 220 euros brut à l’embauche. Un chiffre bricolé, car la grille de salaire démarre à 1 975 euros brut, soit 1 600 euros net, pour des horaires décalés, changés au dernier moment, le travail les week-ends, les horaires journaliers en deux fois, ou sans coupure repas, et les difficultés d’organisation que tout cela amène pour la vie familiale.
Concernant les bus scolaires, c’est encore pire. Il reste encore beaucoup de contrats à temps partiel de 800 euros net par mois. Les conducteurs ont alors une journée de travail découpée en deux parties, voire trois, de deux heures chacune, par exemple deux heures le matin, deux heures le midi, deux heures le soir.
Pour ne céder ni sur les salaires ni sur le recrutement, le patronat utilise l’apprentissage, les CDD, l’intérim, ainsi que les financements publics à la formation au permis D « transports en commun ». Des centaines de jeunes sont formés au permis D, et les patrons espèrent que cela leur fournira les conducteurs manquants, sans augmenter les salaires. Ils comptent aussi sur la réforme de l’assurance chômage. Ils espèrent ainsi obtenir des travailleurs obligés d’accepter des emplois mal payés aux contraintes difficiles.
La réalité qu’il y a derrière le manque de conducteurs de bus, c’est que les patrons veulent des travailleurs de plus en plus exploités, mal payés et aux conditions de travail dégradées.