Pesticides : condamnation dérisoire pour Bayer-Monsanto14/12/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/12/2837.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Pesticides : condamnation dérisoire pour Bayer-Monsanto

La firme Bayer, qui a racheté Monsanto, vient d’être condamnée à indemniser un agriculteur intoxiqué par un de ses herbicides, le Lasso, pour un montant de 11 135 euros. Après quinze ans de bataille judiciaire, cette décision du tribunal est comme un dernier crachat à la figure de l’agriculteur.

Paul François, agriculteur en maïs, blé et colza dans les Charentes, avait été intoxiqué en 2004. Après un épandage au Lasso, il voulait vérifier que la cuve qui avait contenu le désherbant était bien nettoyée. Or l’eau et la chaleur avaient transformé ce qui restait de produit en un gaz qu’il a inhalé pendant à peine quelques secondes. Cela a suffi pour qu’il tombe dans le coma et doive être hospitalisé quelques jours. Cinq mois plus tard, les comas se sont répétés avec des maux de tête intenses. Il a dû être hospitalisé plusieurs mois. Une tumeur à la thyroïde a été détectée. Aujourd’hui, ses maux de tête n’ont toujours pas disparu. Mais sa maladie a été reconnue comme maladie professionnelle.

Des dizaines de milliers d’agriculteurs et d’ouvriers agricoles sont sans doute victimes de l’utilisation de ces produits toxiques. L’association qu’a créée Paul François a déjà rassemblé plus de 1 000 dossiers. Comme l’agriculteur l’explique bien, il avait commencé à travailler dans les années 1970 sans produit chimique. À l’époque, le désherbage se faisait par un travail manuel difficile et les herbicides chimiques étaient apparus comme une vraie solution. Cela aurait pu être le cas si les produits commercialisés l’avaient été avec précaution. Mais les firmes et les organismes sanitaires censés les contrôler ont laissé passer des poisons, en les couvrant de leur autorité.

Quand Bayer a racheté Monsanto, les dirigeants du groupe ont annoncé publiquement qu’ils avaient provisionné des milliards de dollars pour faire face à tous les procès intentés par des victimes de l’utilisation des herbicides et pesticides toxiques, dont le Lasso et surtout le fameux Roundup contenant du glyphosate. Ces moyens financiers énormes ont permis aux firmes de payer des armées d’avocats pour ne pas avoir à assumer les dégâts sanitaires causés par leurs produits, et pour pouvoir continuer à les produire et les vendre.

Le Lasso a été interdit au Canada en 1987, au Royaume-Uni et en Belgique en 1992, puis en France en 2007 et le combat de Paul François n’y est pas pour rien. Mais ce produit continue à être produit et vendu, notamment en Asie. Quant au glyphosate, qui est classé comme produit cancérogène par l’Autorité européenne de sécurité des aliments, il n’est toujours pas interdit en France. Pourtant, en Californie, un jardinier atteint d’un cancer du sang après avoir utilisé du glyphosate a obtenu plusieurs dizaines de millions de dollars d’indemnités versées par Monsanto après un accord à l’amiable, sorte d’aveu de la firme quant à la toxicité de son produit.

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