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Leur société
Retraites : les travailleurs ne tournent pas la page !
Parmi les cinq syndicats représentatifs invités à rencontrer la Première ministre Élisabeth Borne, la CFDT, la CFTC, la CFE-CGC ont rapidement répondu qu’ils acceptaient. La CGT a annoncé à son tour, le 6 mai, que sa secrétaire générale, Sophie Binet, se rendrait à Matignon. FO doit encore donner sa réponse.
En organisant ces rencontres, qui doivent avoir lieu les 16 et 17 mai, le gouvernement tente de reprendre le prétendu « dialogue social » après la promulgation de la réforme des retraites. Une précédente rencontre avait déjà eu lieu le 5 avril. Reçus ensemble à Matignon, les dirigeants de l’intersyndicale avaient démonstrativement quitté la salle après moins d’une heure de discussion, après que la Première ministre eut refusé de retirer la réforme des retraites.
Cette fois-ci, pour limiter le risque d’une réaction commune, Borne a invité chaque syndicat à une rencontre séparée. Pour leur permettre de venir sans pour autant donner l’impression qu’ils acceptent de « tourner la page » de la réforme des retraites, aucun ordre du jour précis n’a été fixé.
En fait, après quatre mois de manifestations, le gouvernement voudrait bien rétablir des « relations apaisées » avec les confédérations syndicales, pour reprendre la formule de Borne. Mais on ne voit pas pourquoi leurs dirigeants devraient lui faciliter la tâche. En cherchant à passer en force, Macron a voulu donner l’image d’un pouvoir fort, capable de mener sa politique antiouvrière en traitant par le mépris les dirigeants des centrales syndicales. Ceux-ci ont voulu faire la démonstration qu’il fallait compter avec eux et que le gouvernement aurait mieux fait de chercher davantage à les associer à sa politique consistant à imposer des reculs à imposer aux travailleurs. L’attitude de Borne montre que celle-ci veut bien maintenant leur montrer un peu de considération.
Les responsables syndicaux vont-ils maintenant se prêter de nouveau à un prétendu dialogue social ? Ils y sont certainement disposés, puisque l’intersyndicale avait déclaré au lendemain du 1er Mai que les organisations syndicales comptaient rappeler « leur refus de la réforme des retraites » mais entendaient aussi formuler des propositions « pour que les préoccupations des salariés soient enfin prises en compte ».
En même temps, l’intersyndicale ne voudrait pas perdre le crédit que lui a valu son refus du report de l’âge de la retraite à 64 ans. Elle a appelé à une nouvelle journée de manifestation le 6 juin, soit deux jours avant l’examen d’une proposition de loi d’abrogation de la réforme déposée par un groupe de députés centristes qui ont trouvé ainsi le moyen de faire parler d’eux. L’appel à manifester accompagne une politique, menée tout au long du mouvement par l’intersyndicale, qui voudrait aussi amener les travailleurs à s’en remettre aux institutions, Parlement ou Conseil constitutionnel.
Bien d’autres leçons peuvent être heureusement tirées de ce mouvement au cours duquel le monde du travail a relevé la tête. Beaucoup ont fait grève et ont manifesté pour la première fois. Des liens ont été créés entre des travailleurs d’entreprises et de corporations différentes, qui sont autant d’atouts pour faire face aux attaques que le gouvernement et le grand patronat s’apprêtent à mener dans les mois qui viennent. Beaucoup de ceux qui ont manifesté ces derniers mois estiment que ce n’est pas fini et se sentent renforcés pour les prochains combats. C’est cela qui compte.