Groenland : provocations de Trump et convoitises impérialistes15/01/20252025Journal/medias/journalarticle/images/2025/01/P9_Trump_et_Canada_Ok_Lupo_Bdd9UaI.jpg.420x236_q85_box-0%2C0%2C830%2C466_crop_detail.jpg

Dans le monde

Groenland : provocations de Trump et convoitises impérialistes

En menaçant de mettre la main sur le Groenland sans exclure l’usage de la force, Trump a déclenché des réactions indignées des dirigeants européens, qui ont appelé au respect des « frontières souveraines de l’Union européenne ».

Illustration - provocations de Trump et convoitises impérialistes

Les frontières de l’UE s’étendent en effet outre-Atlantique, puisque le Groenland est sous le contrôle du Danemark depuis le 18e siècle.

Colonie, puis province à partir de 1953, et enfin territoire autonome à partir de 1979, le Groenland a été soumis à une « danisation » forcée qui a bouleversé le mode de vie des Inuits, la population autochtone. Forcés de parler danois et de renoncer à leurs habitats et à leurs pratiques traditionnelles de chasse et de pêche, les Inuits ont été réduits à la condition de sous- citoyens, les meilleurs emplois et logements étant réservés aux colons envoyés depuis la métropole. Il a fallu attendre 2009 pour que le groenlandais devienne la langue officielle de l’île et qu’un lent processus vers l’indépendance soit organisé. Une minorité de notables et de politiciens locaux y trouve son compte, mais la majorité de la population continue à payer les ravages de la colonisation : le taux de pauvreté s’élève à 20 %, et le taux de suicide chez les Inuits est parmi les plus élevés au monde.

L’indignation du Danemark est donc celle du petit prédateur qui pourrait se faire voler sa proie par un gros carnassier. Il a peu de chances de l’en empêcher si celui-ci décide d’aller jusqu’au bout, d’autant que les États-Unis sont déjà présents : ils ont laissé sur place des troupes après la Deuxième Guerre mondiale et disposent d’une base militaire dans le nord-ouest de l’île.

L’appétit américain est aiguisé par le contexte de concurrence commerciale mondiale exacerbée. Le sous-sol du Groenland recèle de nombreux minerais, tels que du fer, du nickel, de l’or, de l’uranium, du cobalt, ainsi que des terres rares, dont 90 % de la production provient actuellement de Chine. Diversifier les sources d’approvisionnement de ces matériaux, indispensables aux technologies modernes (smartphones, batteries de véhicules électriques), serait très avantageux pour les capitalistes américains. Jeff Bezos et Bill Gates sont d’ailleurs déjà actionnaires d’une entreprise explorant le Groenland pour trouver du nickel, du cuivre et du cobalt, tandis qu’Elon Musk a appuyé avec enthousiasme les projets d’annexion de son ami Trump.

Les États-Unis voudraient aussi contenir l’influence de la Chine et de la Russie dans l’Arctique. Avec la fonte des glaces, la route maritime du Nord entre la Chine et l’Europe devient de plus en plus praticable, ce qui rend la région stratégique pour le commerce mondial. Le gouvernement local du Groenland s’orientant vers la négociation de l’indépendance, les États-Unis ont intérêt à consolider leur position afin d’empêcher leurs concurrents d’en tirer profit. Ils ont d’ailleurs déjà fait pression sur le Groenland il y a quelques années pour y faire annuler des projets d’investissements chinois.

Trump ne prend pas de gants pour affirmer les intérêts de l’impérialisme américain, sans égard pour ses alliés européens. Il parviendra peut-être à renforcer les intérêts américains sans aller jusqu’à l’annexion. Quoi qu’il en soit, il n’envisage même pas en paroles que la population du Groenland puisse avoir son mot à dire. Cette brutalité verbale est révélatrice de la réalité d’un système impérialiste fondé sur le pillage et le droit du plus fort.

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