Harkis : l’État condamné pour traitements inhumains10/04/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/04/une_2906-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Harkis : l’État condamné pour traitements inhumains

Après cinq années de procédure, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) vient de condamner l’État français pour traitements inhumains et dégradants envers des Harkis. Ces traitements avaient été infligés à quatre enfants de Harkis algériens internés avec leurs parents dans le camp de Bias, dans le Lot-et-Garonne, dans les années 1960-1970.

La France avait enrôlé les Harkis comme supplétifs de son armée, au cours de la sale guerre coloniale contre l’indépendance de l’Algérie. Après avoir torturé, violé, tué des centaines de milliers d’Algériens, elle avait été obligée de reconnaître sa défaite en 1962. Elle avait mis les Harkis dans une situation impossible : rester en Algérie et être traités comme des traîtres sur lesquels des vengeances mortelles s’exerçaient, ou fuir. Sur l’ordre explicite du gouvernement de Gaulle, l’armée française abandonna à la mort de nombreux Harkis qui auraient voulu se réfugier en France.

Près de 100 000 Harkis, en comptant leurs familles, réussirent tout de même à survivre et à traverser la Méditerranée. Le mépris colonial ne cessa pas pour autant : la moitié d’entre eux furent parqués dans des « hameaux de forestage » entourés de barbelés, Ils n’étaient pas libres de se déplacer et leurs enfants n’allaient pas à l’école. Selon la CEDH, les conditions de vie imposées par l’État à ces familles « n’étaient pas compatibles avec le respect de la dignité humaine et s’accompagnaient en outre d’atteintes aux libertés individuelles ».

En 2021, Macron avait solennellement demandé pardon aux Harkis encore en vie et à leurs descendants et reconnu un « abandon par la République française ». Mais la loi qui avait suivi en 2022 ne leur avait accordé qu’une réparation pécuniaire ridiculement faible pour compenser leur traitement en parias : 3 000 euros, plus 1 000 euros par année d’enfermement dans les camps. La CEDH a aussi condamné la France à accorder quatre fois plus aux plaignants. Reste à savoir si les milliers d’autres descendants de Harkis en bénéficieront aussi.

Jetés aux oubliettes après usage : voici comment l’impérialisme français a traité ceux dont il s’était servi.

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