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Algérie : Bouteflika prépare de nouvelles attaques contre les travailleurs
Depuis le 13 janvier, en principe, la loi de concorde nationale est arrivée à échéance. Des centaines de terroristes des GIA (Groupes Islamiques Armés) se sont rendus. En ce qui concerne PAIS (le bras armé du FIS), ses membres ont bénéficié d'une amnistie. Ces ex-terroristes ont été désarmés. Certains sont rentrés chez eux. Ceux qui habitaient en zone rurale isolée et sont sous la menace de représailles des GIA, sont regroupés sous protection des forces de sécurité. D'autres doivent être déplacés pour ne pas se retrouver dans leurs anciens quartiers face aux familles de leurs victimes.
Les attentats et les massacres de civils n'ont pas cessé pour autant. Le récent mois de Ramadan aurait compté un peu plus de victimes que l'an dernier. Les GIA ont voulu ainsi marquer leur refus de toute reddition.
Malgré cette persistance des attentats, la capacité de nuisance des GIA est en recul depuis des années. La reddition de centaines de membres des GIA, comme la dissolution de PAIS, constituent un succès pour le pouvoir. Succès également le fait que les négociations de dernière minute avec l'AIS n'aient pas permis aux dirigeants politiques de l'ex-FIS d'obtenir la garantie que ce parti serait légalisé.
Les mois qui viennent nous diront si l'armée réussira à réduire les maquis des GIA qui ont refusé de déposer les armes. L'opération de « concorde nationale » avait comme objectif de rétablir la stabilité politique, nécessaire, selon Bouteflika, à la relance économique. Or, comme les caisses de l'État sont vides, il n'y aura pas de relance économique sans investissements étrangers.
Lors d'une récente interview, Bouteflika manifestait son principal souci : « Les Algériens doivent comprendre aussi que les années soixantedix, c'est terminé et que la manne céleste n'existe plus. Les Algériens doivent comprendre que, s'ils ne se décidentpas à travailler, et, par voie de conséquence, à créer eux-mêmes la richesse... L'Algérie de papa est terminée en tout cas... Lepremier travail c'est defaire la paix. Je vous ai dit: il y a des milliards de dollars qui attendentpour s'investir Je sais exactement où et comment. Mais je sais que je n'aurai pas un seul dollar sije n'ai pas réglé le problème de paix et de sécurité ».
Mais si les chefs d'État européens, américains ou français considèrent aujourd'hui que le pouvoir algérien contrôle la situation et est devenu, de ce fait, à nouveau fréquentable, en ce qui concerne les investissements, on en est toujours au point mort.
Bouteflika essaye de convaincre les entreprises françaises, italiennes, américaines de venir investir en Algérie, maintenant que la stabilité politique est rétablie ou en voie de rétablissement. Les lois, les règlements seront même modifiées pour les attirer.
Dans cette perspective, Bouteflika envisage de privatiser l'ensemble de l'économie - « Il n'y a pas de secteur tabou », a-t-il martelé. Même la Sonatrach, compagnie pétrolière stratégique pour l'État puisque les hydrocarbures représentent plus de 95 % des recettes d'exportation, est destinée à être privatisée (même si l'État devrait, en principe, y rester majoritaire). Pour faire face à la dette qui dépasse 30 millions de dollars, les dirigeants algériens misent sur ces privatisations qui permettraient à l'État de convertir sa créance en actions.
Mais les investissements ne se bousculent pas. Au début de février, une importante délégation du Medef a séjourné à Alger : Alcatel, Alstom, Renault, Bouygues, Bull, BNP-Paribas, Crédit Lyonnais, Thomson-CSF, Danone, Vivendi... en tout 94 entreprises françaises étaient du voyage.
En fait très peu de contrats auraient été finalisés et les entreprises françaises semblent avoir été beaucoup plus intéressées à la création ou au développement de leurs réseaux de distribution.
Cela Bouteflika le reconnaît publiquement : « Les demandes algériennes sur l'essentiel sont connues. Rien n'est réglé jusqu'à maintenant. Il y a une amélioration, si vous voulez, dans le sens de l'urbanité des rapports. Il y a une amélioration très spectaculaire. Sur les problèmes de fond, il n'y a aucun progrès »
Pour convaincre les investisseurs étrangers, Bouteflika devra donc faire beaucoup plus, Il devra les persuader qu'ils ont intérêt à investir et qu'ils peuvent faire de bonnes affaires, des profits suffisants en rachetant des entreprises algériennes. Il devra àussi les convaincre qu'il n'y aura pas de risque de conflits sociaux.
Bouteflika devra donc ne pas se contenter de privatiser, mais il devra réduire les effectifs ou même fermer les unités considérées comme non rentables.
Exemple: depuis quelques jours le complexe Véhicule Industriel de Rouiba (près d'Alger) ne fonctionne plus, la banque nationale d'Algérie refusant de débloquer les fonds pour payer salaires et matières premières. La direction de la SNVI, celle de la banque et derrière eux, le pouvoir, veulent imposer un nouveau plan de restructuration, c'est-à-dire le licencicment de milliers d'ouvriers. C'est la condition pour que Renault ou d'autres trusts européens prennent une participation dans l'entreprise.
Bouteflika annonce clairement la couleur. Il y aura de nouveaux licenciements, encore plus de chômage, encore plus de misère sans même qu'il y ait la garantie que des investissements étrangers seront faits ; investissements qui ne se traduiraient d'ailleurs même pas par un nombre significatif de créations d'emplois.
Tout ce que l'on peut souhaiter, c'est que les travailleurs refusent d'être jetés à la rue, qu'ils se défendent en n'acceptant pas le chantage à la stabilité politique que leur fait Bouteflika.