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Dans le monde
Volkswagen – Bruxelles : Chantage à l’emploi
«Il pourrait s'agir d'une Audi mais rien n'est décidé. Il faudra examiner si, du point de vue économique, c'est faisable. Avec quel volume et quel nombre de travailleurs.» «Le tout est de savoir avec quelle rentabilité une Audi peut être assemblée à Bruxelles. En Allemagne, nous avons réduit nos coûts de 20%. Il faut voir ici avec les syndicats belges quelle peut être l'ampleur de cette réduction de coûts: 15, 20%...»Qui s'exprime ainsi? Le PDG de Volkswagen? Non, c'est Bernd Osterloh, président de la délégation syndicaleIGMetall, et aussi membre du conseil de surveillance de VW (Volkswagen), aux côtés d'autres patrons et de représentants des actionnaires!
Cela n'empêche pas le responsable bruxellois de la FGTB-Metal, dont dépend l'usine VW de Forest, près de Bruxelles, de se réjouir: «Grâce à IGMetall, on pourra peut-être éviter la catastrophe sociale annoncée. Si ses engagements se concrétisent, on garderait 3200 emplois à l'usine de Forest. Sur 2200 pertes d'emplois, de 700 à 1000 pourraient être épongées par des prépensions, selon l'âge de départ retenu. On fera appel aux départs volontaires, avec prime à la clé.»
Effectivement, après une semaine de suspense savamment entretenu, la direction du groupe VW a confirmé qu'un petit modèle d'Audi pourrait être produit à Bruxelles en 2009, avec 3000 emplois. Cette annonce, la veille de la manifestation prévue samedi 2 décembre à Bruxelles contre les suppressions d'emplois, a sans doute contribué à démobiliser les travailleurs qui ne se sont retrouvés qu'à 20000 environ, alors que c'est au double ou au triple qu'ils se sont souvent retrouvés dans les cas analogues.
Mais la démobilisation est surtout la conséquence du refus des syndicats d'organiser quoi que ce soit pour faire pression sur le patronat et le gouvernement. L'émotion et l'élan de sympathie qui s'étaient manifestés après l'annonce de la suppression de 4000 emplois sont retombés car c'est la seule version patronale qui est répercutée par les media. Dans les discours à la fin de la manifestation, il n'y a eu aucun appel à la mobilisation, pas même des salariés de VW, pour qu'ils viennent à l'usine le lundi suivant afin de peser sur les négociations qui s'engagent! Ce qui fait que seuls 100 à 200ouvriers se retrouvent régulièrement devant l'usine à chaque poste.
Les négociations, lundi 4 décembre, n'ont rien apporté en ce qui concerne le sort réservé aux salariés en 2007 et 2008. La direction a précisé qu'elle conditionne l'arrivée de l'Audi à une réduction de 20% des coûts salariaux, dont le passage de 35 à 38heures hebdomadaires en 2009. Et beaucoup d'ouvriers pourraient, en 2009, ne pas être des salariés directs de VW, donc être payés très en dessous des 1500 euros net actuels, et plus flexibles. Et pour bien faire comprendre que la grève doit se terminer rapidement, les 5400salariés ne sont plus payés par la direction de VW depuis le lundi 4décembre. Les syndiqués -plus de 90% du personnel- reçoivent 25euros par jour versés par les syndicats, soit à peu près la moitié de ce que les ouvriers touchent d'habitude. De son côté, après avoir accordé de substantiels cadeaux à VW ces dernières années, le gouvernement belge s'est engagé à de nouvelles réductions fiscales et de cotisations sociales.
Pour les patrons belges, VW est un test. Si l'abaissement du coût du travail peut y être imposé sans trop de réactions ouvrières et syndicales, ils ne tarderont pas à chercher à l'imposer dans d'autres entreprises et, en plus, ils sont assurés de bénéficier eux aussi de réductions de charges «pour ne pas fausser la concurrence». «Volkswagen sera un tremplin pour rendre notre économie plus compétitive», a pu déclarer Verhofstadt, Premier ministre libéral très à l'écoute des souhaits patronaux.
Mais après l'abaissement du coût du travail à VW-Allemagne, obtenu par quatre heures de travail de plus non payées par semaine, l'abaissement à VW-Belgique, si les salariés plient devant le chantage, ce sera le tour de l'Espagne où VW déclare que le coût du travail est trop élevé...
Seule une réaction des travailleurs pourra mettre une limite à ce chantage à la concurrence.