Portugal : L'interdiction de l'IVG, une législation réactionnaire08/02/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/02/une2010.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Portugal : L'interdiction de l'IVG, une législation réactionnaire

Le 11 février, les Portugais sont appelés à se prononcer par référendum sur un projet autorisant l'interruption volontaire de grossesse (IVG) sur simple demande jusqu'à la dixième semaine. Jusqu'ici, elle n'est autorisée qu'en cas de viol, de danger de mort ou de lésions irréversibles pour la femme, ou de malformation congénitale du foetus. Cette législation réactionnaire témoigne de l'influence encore très forte de l'Église catholique sur la société.

Or dans ce pays, sur un peu plus de cinq millions de femmes, il y a chaque année 300 à 500 IVGlégales, mais entre 20000 et 40000 avortements clandestins, qui entraînent des dizaines de décès et environ 10000 hospitalisations.

En 1998, le Parlement avait adopté en première lecture une loi légalisant l'IVG jusqu'à la dixième semaine de grossesse. Mais le gouvernement socialiste d'alors, dirigé par le dévot Guterres, avait imposé que l'on procède à une consultation par voie de référendum, où le «non», préconisé par l'Église, l'avait emporté, mais de très peu. À peine 30% des électeurs y avaient participé. Guterres avait saisi ce prétexte pour ne pas présenter le projet de loi au vote définitif par le Parlement. Et les procès pour avortement continuèrent donc.

Fin 2000, un procès contre 43 prévenus dans la ville de Maia, près de Porto, secoua l'opinion, un peu comme en France le procès de Bobigny en 1971. Sur 17femmes accusées d'avoir avorté, une seule fut condamnée, à quatre mois de prison ou une amende de 120euros: une chômeuse célibataire de 20ans, déjà mère d'un enfant! Parmi les accusés pour avoir pratiqué ou favorisé des avortements, une sage-femme écopa de huit ans et demi de prison et de 34000 euros d'amende. En 2006, un médecin a été condamné pour avortements à trois ans et huit mois de prison, et une infirmière à seize mois. En septembre 2004, le bateau de l'ONG néerlandaise faisant de la propagande pour la contraception et l'IVG, Women on Waves (Femmes sur les ondes), fut même reconduit hors des eaux territoriales portugaises par la marine nationale.

L'actuel référendum propose donc une issue à une situation devenue difficilement tenable. Mais le gouvernement PS ne veut prendre aucune responsabilité. Le Premier ministre José Socrates affirme hypocritement qu'«il ne s'agit pas de libéraliser l'avortement, mais d'élargir les exceptions». Et au cas où le non l'emporterait, il ne présentera même pas de projet de loi devant le Parlement.

Il y a tout de même quelque changement par rapport à 1998. L'Église reste aussi fermement opposée au droit des femmes de recourir à l'IVG, qui selon le cardinal-patriarche de Lisbonne serait une «atteinte à la civilisation». Mais, parce qu'elle sent que le camp des pro-IVG s'est renforcé, y compris parmi ses ouailles, tout en prêchant «pour la vie» et en disant «qu'il n'est pas nécessaire de changer la loi», elle ne donne pas cette fois de consigne formelle de vote.

Souhaitons qu'au Portugal les femmes obtiennent enfin ce droit légitime de décider si oui ou non elles veulent un enfant.

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