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- Lutte ouvrière n°2010
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Dans les entreprises
Procès Moulinex - Caen : 600 salariés licenciés attaquent aux Prud'hommes
Mardi 6 février s'est ouvert, au tribunal des Prud'hommes de Caen, un procès qui est, d'une certaine manière, celui de la faillite de Moulinex. En septembre 2001, cette société avait déposé son bilan, en jetant à la rue 2 880 salariés de ses usines de Basse-Normandie.
Aujourd'hui, 597 anciens de Moulinex attaquent la structure qui gère le plan dit «social». Ils contestent la forme de ce plan: 15 anciens salariés ont déjà ainsi obtenu de 8 600 à 18000 euros, jugement confirmé en appel, ce qui a encouragé nombre de licenciés à s'associer au procès actuel. Ils dénoncent aussi les raisons de leur licenciement, en demandant qu'il soit reconnu comme abusif.
Moulinex avait été repris, une première fois, par un groupe qui en avait tiré tout ce qu'il avait pu, puis avait dû déposer son bilan. Les autorités avaient alors encouragé Seb à se porter repreneur de la marque Moulinex, ce qu'il fit avant de se débarrasser de l'immense majorité des salariés et des sites de production du groupe. Le dernier patron de Moulinex fut, lui, royalement reclassé par Seb, à qui il avait permis de récupérer, pour presque rien, des parts de marché et de conforter sa place de n°1 du secteur de l'électro-ménager. Le comble est que, l'ex-patron licencieur ayant été débarqué, il s'est permis après le procès victorieux de 15 licenciés de réclamer 176000 euros pour «licenciement abusif»!
L'écoeurement et la révolte des anciens de Moulinex sont d'autant plus légitimes que les autorités - État, région, départements - jamais en reste pour tenter de faire croire qu'elles s'activaient à les reclasser, les ont abandonnés à leur sort.
Il avait ainsi été annoncé que, pour «redynamiser le bassin d'emploi», 160 millions d'euros étaient débloqués pour servir à la réindustrialisation et à la reconversion. Ces fonds sont surtout allés à la filière équine (haras, etc.), à la filière nautique ou ont arrosé des entreprises s'installant sur les anciens sites de Moulinex, parfois en déménageant de quelques kilomètres sans créer un emploi.
Quant aux 2 880 licenciés, des ouvrières ayant passé 20 à 30 ans dans ces usines pour la plupart, le préfet prétend qu'il n'y en a maintenant que 19 «qui restent sans solution». Mais, rien que sur les 10% d'anciens du groupe interrogés par diverses associations, plus de 100 étaient aux Assedic! En fait, plus de cinq ans après leur licenciement, un tiers seulement des licenciés auraient retrouvé un emploi plus ou moins stable.
Alors, face à ce désastre social à l'échelle de toute une région, organisé par le patronat avec la complicité des autorités, on ne peut que souhaiter que les plaignants l'emportent au tribunal. Même si, pour parler de justice, il en faudrait encore bien plus.