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Leur société
Cinéma sécuritaire : Le projet de loi sur la "rétention de sûreté"
Le gouvernement a proposé au Parlement un projet de loi relatif à la " rétention de sûreté ". Il s'agit de placer dans des centres spéciaux les détenus ayant purgé leur peine mais que trois magistrats, après consultation d'une commission composée entre autres de psychiatres, auraient jugés encore dangereux.
Ce traitement serait applicable à des détenus condamnés à une peine de quinze ans de prison ou plus, pour des crimes sexuels ou particulièrement violents commis sur des mineurs. La rétention, prévue pour un an, pourrait être renouvelée indéfiniment.
D'après le gouvernement, il s'agit d'éviter, par exemple, des actes de récidive d'un pédophile, comme celui qui s'est produit à Roubaix en août dernier, actes épouvantables heureusement rares - 1 % de récidive chez les violeurs selon l'ancien ministre Robert Badinter - mais toujours très relayés et amplifiés par les médias.
Toujours prêt à dégainer sur les sujets sensibles et médiatisés, Sarkozy a déclaré : " Tant qu'ils ne se feront pas soigner, tous ces prédateurs ne sortiront pas de prison. " Mais on se demande alors pourquoi on ne les soigne pas dès le début de leur incarcération, au lieu d'attendre quinze ans et plus, et même pourquoi ils ne se retrouvent pas en hôpital psychiatrique au lieu du système carcéral qui ne peut que contribuer à aggraver leurs troubles mentaux.
La raison est tout simplement qu'il faudrait consacrer des moyens importants à la médecine psychiatrique et au suivi de ce type de prisonniers - et des autres - alors que les budgets correspondants sont de plus en plus réduits à la portion congrue. Le gouvernement prétend qu'il veut " protéger la société " mais, aux mesures qui pourraient aider à soigner ces malades mentaux, il préfère le cinéma sécuritaire.
Sylvie MARÉCHAL
La prison ne soigne pas...
Selon un rapport publié en 2005 par l'Observatoire international des prisons, la prison est " pathogène " et contribue à rendre " paranoïaque ". " Un entrant (en prison) sur dix déclare avoir fait l'objet d'un suivi psychiatrique dans l'année précédant l'incarcération " mais " 56 % d'entre eux n'ont pas eu la possibilité de rencontrer un psychiatre à leur arrivée en détention. Pour un grand nombre de détenus, prison est synonyme de rupture du suivi psychiatrique. "
On assiste à " l'incarcération grandissante des malades mentaux " et " la banalisation de cette évolution en partie liée avec la fermeture d'un très grand nombre de lits en psychiatrie ". " Pour la CGT pénitentiaire, la prison ne doit pas être considérée comme "un espace de soins". "
En 2004, le ministère de la Santé n'a pu que constater une " inadéquation entre les besoins de prise en charge et l'offre effective ". En clair, il n'y a pas assez de médecins, pas assez de services, pas assez de moyens.
Après quoi on vient nous dire que la solution serait d'enfermer les prisonniers encore au-delà de leur peine pour les soigner !