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Leur société
Les banques et le plan du gouvernement : Du cinéma... à la réalité
Les banques doivent jouer le jeu : c'est, en substance, le message du gouvernement qui veut faire croire qu'il veillera sérieusement à ce que son plan de 360 milliards d'euros au secteur bancaire soit employé à aider les entreprises, et donc à éviter les faillites génératrices de chômage.
Manque de chance, un rapport de la Banque de France, d'octobre 2008, révèle que plus des trois quarts des banques ont durci leurs critères d'attribution de crédit aux entreprises, en particulier pour les PME. Et pour le dernier trimestre plus des deux tiers d'entre elles ont l'intention de resserrer à nouveau ces critères.
Les médias se font l'écho des doléances de patrons de PME, comme celui d'une fabrique d'ampoules à faible consommation, expliquant qu'il a dû contacter huit banques pour obtenir une promesse de crédit et que, si finalement, deux avaient donné leur accord, l'une, la BNP l'a lâché en prétextant une pièce manquante au dossier, et l'autre, le Crédit Agricole, s'est mis aux abonnés absents à partir de la mi-octobre. Pourtant, 70 % du crédit demandé étaient garantis par Oséo, un organisme public de soutien aux PME. Même l'aval de cet établissement financier placé sous la tutelle du ministère de l'Économie n'avait pas convaincu les banquiers.
Un face-à-face entre 300 dirigeants de PME des Bouches-du-Rhône et des banquiers, réunis pour prendre connaissance du plan gouvernemental, a été plutôt houleux, les patrons protestant contre les refus de crédit de quelques dizaines de milliers d'euros pour l'achat de machines ou l'autorisation de découvert, et les banquiers rappelant que leur rôle n'est pas de financer des pertes ! Et un professionnel de l'immobilier les apostrophait : " Vous devez partager avec nous l'argent qui sera injecté chez vous " car, prédisait-il : " Nous allons entraîner beaucoup de monde dans notre chute ".
Les banques ne sont pas prêteuses, sauf si cela leur rapporte, beaucoup de préférence. Les patrons des PME " réfléchissent pour savoir de combien de salariés ils vont devoir se séparer ", comme le dit l'un d'eux en usant d'euphémisme. Mais les salariés, eux, n'ont aucune raison d'accepter de payer la crise d'un système de fous, ni de faire confiance au gouvernement et à son plan.
L'État promet que l'argent ira bien là où il doit aller pour faire redémarrer l'économie. Il a même nommé un " médiateur du crédit ", qui a déjà reçu plus de mille demandes d'entreprises en difficulté et qui prodiguera aux banques de belles leçons de morale pour les inciter à jouer le jeu. Car l'essentiel est dans l'apparence, face à une opinion publique angoissée par la perspective du chômage.
Le Premier ministre laisse même courir-quelle audace ! - le bruit d'une possible entrée de l'État dans le capital des banques récalcitrantes. Cette " nationalisation " leur apparaît comme une " plaisanterie ", selon leurs propres termes. Entre autres, parce que cela coûterait trop cher à l'État de devenir actionnaire majoritaire, vu la valeur des banques, dont il n'envisage pas une seconde de déposséder les actionnaires sans rachat !
Alors, les banques vont effectivement jouer le jeu, celui des apparences. Elles nous gratifient de pleines pages de publicité censées restaurer leur image : le Crédit Agricole se veut l'accompagnateur de " ceux qui développent l'économie de nos territoires ", la Banque Populaire " le premier distributeur des prêts à la création d'entreprises " et la Société Générale " plus que jamais ouverte à vos besoins d'aujourd'hui " sous l'image d'un artisan boulanger ou d'un jeune couple souriant à l'acceptation de leur demande de crédit. Pour le reste, elles continueront comme avant à utiliser l'argent que leur procure l'État, c'est-à-dire pour l'essentiel l'argent de la population, pour spéculer.