Un des dix lycées classés en ZEP de l'académie de Créteil, le lycée professionnel Arthur-Rimbaud de La Courneuve, disposait jusqu'à présent d'un effectif maximum de 24 élèves par classe. Le rectorat vient d'annoncer sa volonté de faire passer l'effectif des classes de carrières sanitaires et sociales (CSS) à 30 élèves, à la rentrée prochaine, soit 25 % d'augmentation.

En août dernier, lors d'une visite d'un inspecteur dans l'établissement désert, il avait été constaté que, « moyennant quelques aménagements en mobilier, il y a la place ». Et comme s'il s'agissait d'un entrepôt de stockage et non d'un lieu d'apprentissage, la décision a donc été prise d'augmenter le nombre des élèves ! En fait, comme le rectorat ferme des sections CSS dans d'autres établissements de la Seine-Saint-Denis, il s'efforce de recaser les élèves dans les établissements voisins.

Il s'agit-là de la traduction locale des suppressions de postes décidées au plan national. À l'échelle du pays, le gouvernement a prévu la suppression de 16 000 postes à la rentrée prochaine. Toute la hiérarchie de l'Éducation nationale est donc mobilisée pour atteindre ce sinistre objectif. En cas de réussite, les recteurs auront droit à une prime de 19 000 à 22 000 euros.

Dans le secondaire, les académies les plus touchées sont celles de la banlieue parisienne, de Lille et de l'est du pays, celles qui concentrent le plus de difficultés économiques et sociales. Pour ces raisons, les établissements de ces académies disposaient jusqu'à présent de quelques maigres compensations, en particulier un taux d'encadrement plus élevé que la moyenne et des effectifs de classes allégés. Ce sont ces dispositifs que, pour des raisons budgétaires, le gouvernement voudrait aujourd'hui supprimer d'un revers de main.

À l'annonce de cette mesure, tous les enseignants du lycée Arthur-Rimbaud ont été choqués. Une classe de La Courneuve n'est pas celle d'un lycée aisé de Neuilly. Comment croire que les élèves des banlieues défavorisées peuvent laisser à l'entrée de l'établissement les difficultés qu'ils affrontent à l'extérieur ? De nombreux élèves sont mal logés, partagent leur chambre ou vivent en foyer. D'autres sont boursiers, contraints de travailler le soir et le week-end. D'autres encore sont marqués par la violence de la famille ou de la cité, ont traîné avec eux une scolarité faite d'échecs, de conflits... Beaucoup, à La Courneuve, viennent du bout du monde, du Sri Lanka, de Chine, du Pakistan, d'Afrique noire. Ils possèdent mal le français et sont obligés à des efforts particuliers qui demandent une attention soutenue de la part des enseignants. Alors, ce qui est déjà difficile à 24 le sera encore plus à 30.

Pour s'opposer à la dégradation programmée de l'enseignement, les professeurs ont voté le principe de la grève pour le jeudi 13 janvier, avec conférence de presse et rassemblement au rectorat.