Allemagne : Des salaires de misère... dans un des pays les plus riches du monde20/01/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/01/une2268.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : Des salaires de misère... dans un des pays les plus riches du monde

Médias et politiciens français s'extasient régulièrement sur ce qu'ils appellent le « miracle allemand ». Il est vrai que Destatis, l'équivalent de l'Insee, vient d'annoncer que, en 2011, le PIB de l'Allemagne aurait augmenté de 3 %, et que le chômage aurait à nouveau reculé. Ainsi, malgré la crise, tout irait pour le mieux dans le pays capitaliste le plus puissant d'Europe.

Tout va bien en effet pour les profits des patrons allemands, mais il n'en va pas de même pour ceux qui les produisent et qui ne profitent absolument pas de la bonne santé économique affichée. Plusieurs enquêtes récentes ont ainsi rappelé que 20 % de l'ensemble des salariés ne disposent que de très bas salaires, touchant moins de 10 euros brut de l'heure.

Cette situation est en partie liée à l'absence d'un salaire minimum légal correspondant au smic en France, et valable pour toutes les professions : il n'en existe un que dans une dizaine de branches professionnelles, comme le bâtiment ou le nettoyage industriel. Mais elle est due aussi aux lois Hartz, promulguées à l'époque du chancelier social-démocrate Schröder. Entre autres méfaits, elles obligent les salariés licenciés à accepter ensuite n'importe quel emploi, y compris dans une autre branche que la leur et plus mal payé. Tout cela pousse nombre de travailleurs à cumuler deux ou trois emplois sous-payés pour s'en sortir.

Par ailleurs une étude de l'Institut IAB, lié à l'Agence Fédérale pour l'Emploi, publiée en 2010, estime que 36 % des travailleurs à l'Ouest et 49 % à l'Est du pays travaillent dans des entreprises qui n'ont ni adhéré à une convention de branche ni même signé un accord d'entreprise. Résultat : les salaires y sont souvent inférieurs de 30 % à ceux pratiqués là où une convention s'applique.

Mais même ceux qui sont couverts par un accord collectif ne sont pas assurés d'avoir des revenus corrects. Ainsi le salaire d'embauche d'un pâtissier s'élève en Bavière à 5,26 euros brut de l'heure. Pour les bouchers de Saxe comme pour les coiffeurs du Schleswig-Holstein, il est de 6 euros. Et dans de nombreuses activités, le niveau est inférieur à 8 euros : sécurité dans les aéroports, centres d'appels, nettoyage, agriculture, etc. En outre dans les régions de l'Est, plus de vingt ans après la réunification du pays, les salaires subissent toujours une décote par rapport à l'Ouest, dans le privé comme dans le public.

Par ailleurs, en Allemagne les patrons ne sont pas tenus de payer les intérimaires au salaire du poste qu'ils occupent pendant leur mission. Il a fallu des années de discussions pour que le gouvernement décide d'un salaire minimum pour les intérimaires. Il sera de 7,89 euros à l'Ouest et de 7,01 euros à l'Est.

À tout cela, il faut ajouter l'attitude de véritables patrons voyous, qui se croient tout permis, et dont le nombre va en augmentant. Ainsi à Essen, huit salariés du bâtiment d'origine polonaise, qui travaillaient en plein centre-ville sur le chantier de l'ancien immeuble C & A, ont dû se battre, pendant deux mois en septembre et octobre derniers, contre leur employeur qui ne voulait pas les payer au tarif promis mais... seulement 50 centimes de l'heure. Seule leur détermination leur a finalement permis d'obtenir gain de cause.

Pour ne pas voir augmenter sans cesse le nombre de ceux qui plongent dans la misère tout en travaillant, cette détermination sera nécessaire pour tous les travailleurs, en Allemagne comme en France.

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