Sénégal - La victoire électorale de Macky Sall : Changement ou continuité ?29/03/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/03/une2278.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Sénégal - La victoire électorale de Macky Sall : Changement ou continuité ?

Au Sénégal, Macky Sall, seul candidat restant face à Abdoulaye Wade, président sortant, l'a emporté au deuxième tour de l'élection présidentielle du 25 mars. Les résultats officiels ne sont pas encore connus, mais Abdoulaye Wade a reconnu sa défaite. La presse parle d'un raz de marée en faveur de Macky Sall, et il n'en a pas fallu plus pour que les divers commentateurs se congratulent sur cette « victoire de la démocratie » au Sénégal.

Un article paru - avant le deuxième tour - dans le dernier numéro du Pouvoir aux travailleurs, édité par nos camarades de l'Union africaine des travailleurs communistes internationalistes (UATCI), abordait bien différemment les enjeux de cette élection.

« Wade croyait qu'il allait remporter haut la main l'élection dès le premier tour. Il avait fait ses salamalecs auprès des grands marabouts, il leur a offert des cadeaux pour que ceux-ci demandent à leurs fidèles de voter pour lui. Il a aussi fait des cadeaux aux chefferies traditionnelles des villages pour avoir leur faveur, mais quand il a vu le résultat du premier tour, sa colère se lisait sur son visage. C'est pourtant lui-même qui affirmait fièrement devant des micros qu'il était « très très populaire » et que ses adversaires « ne font pas le poids » devant lui. (...)

Un grand nombre de travailleurs sénégalais se sont réjouis du mauvais résultat de Wade au premier tour, y compris ceux qui avaient voté pour lui lors des deux précédentes élections. Ils ont été déçus par le fait que celui-ci s'est cramponné au pouvoir alors que lui-même avait promis de ne pas se présenter plus de deux fois et avait même fait modifier la Constitution dans ce sens.

Aujourd'hui, c'est Macky Sall qui récolte les fruits de la désillusion. (...) Mais c'est un politicien qui a été formé par Wade et qui se dit fier de l'avoir servi pendant une vingtaine d'années. De mai 2001 à avril 2004, il a occupé plusieurs postes ministériels (entre autres, les Mines, l'Énergie, puis l'Intérieur) avant d'être nommé Premier ministre (d'avril 2004 à juin 2007). Ce n'est qu'en novembre 2008 qu'il a quitté le PDS - le parti de l'ex-président - pour fonder sa propre organisation politique, Alliance pour la république. Il s'est séparé de Wade uniquement parce qu'il se voyait déjà comme son successeur, alors que Wade avait porté sa préférence sur son propre fils, Karim.

Lorsque Macky Sall était à la tête du gouvernement, il ne s'était pas spécialement illustré dans des mesures prises en faveur des classes populaires. Les enseignants, les employés des hôpitaux publics ont dû faire des grèves pour exiger des augmentations de salaire. Ils n'ont obtenu que des promesses sans lendemain. La question de l'approvisionnement en eau potable ainsi que les coupures intolérables de l'électricité n'ont même pas trouvé un début de solution.

En ce moment même, les enseignants sont en grève pour exiger la revalorisation de leur indice de salaire face à la flambée des prix. Ils revendiquent aussi l'attribution des logements de fonction qui leur ont pourtant été promis par leur ministre. De nombreux salariés du secteur public comme du privé se retrouvent dans leurs revendications, car ils sont victimes eux aussi du blocage des salaires, alors que le coût de la vie ne cesse de grimper. À titre d'exemple, au mois de février dernier, le prix d'un sac de riz de 50 kilos est passé brusquement de 18 000 à 25 000 francs CFA. (1) De nombreux travailleurs touchent à peine 50 000 à 60 000 francs CFA par mois, et parfois beaucoup moins (le salaire minimum officiel est de 47 700 francs CFA). (...)

Ceux qui ont gouverné ce pays depuis l'indépendance n'ont toujours eu que du mépris envers les classes laborieuses, dont le niveau de vie n'a fait que se dégrader. Au sortir du deuxième tour, quel que soit le vainqueur, les travailleurs et les petites gens auront toujours un gouvernement contre lequel il faudra lutter pour arracher le droit d'avoir des conditions de vie décentes. »

(1) 1 000 francs CFA équivalent à environ 1,5 euro

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