Le « choc de simplification »... aux dépens de la population03/04/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/04/une2331.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le « choc de simplification »... aux dépens de la population

Lors de son passage à la télévision jeudi 28 mars, Hollande a proposé un « choc de simplification ». Il s'agirait de faciliter les rapports entre l'État et le reste de la société, notion qui mélange les particuliers sans distinction de fortune, les entreprises quelle que soit leur taille, les collectivités locales petites ou grandes.

Le 2 avril, c'est Ayrault qui réunissait tous ses ministres en vue du premier choc. Et le porte-parole de déclarer à la sortie de ce Conseil exceptionnel qu'un « moratoire sur les normes » allait être mis en place dès la fin du mois, que l'administration allait multiplier les procédures par Internet et que des regroupements ou suppressions d'agences de l'État allaient suivre.

Après les hôpitaux, les écoles et les tribunaux, le tour des sous-préfectures ?

Ce dernier point dissimule à peine la poursuite de la réduction des effectifs de l'État, entamée depuis longtemps, amplifiée par Sarkozy, poursuivie par Hollande. Elle a touché les hôpitaux, l'éducation, l'équipement. L'État en est désormais à réduire le nombre de sous-préfectures, comme il a réduit le nombre de tribunaux. Les services des cartes d'identité et des permis de conduire avaient déjà été confiés aux mairies, sans d'ailleurs que l'État leur donne un centime de plus, supprimant au passage un millier de postes dans les sous-préfectures. Aujourd'hui, les partisans des économies budgétaires ironisent sur la sous-préfecture de Barcelonnette (Alpes-de-Haute-Provence) qui gère un territoire de 8 300 habitants, sur celles de Charente-Maritime, distantes de moins de quarante kilomètres les unes des autres, ou tout simplement sur le fait que le découpage administratif date de Napoléon. Mais la raison unique de ces réorganisations est la recherche d'économies. L'État s'ampute volontairement, pour pouvoir offrir crédits, marchés et baisses d'impôts aux capitalistes. Non seulement les intérêts de la population ne sont pas pris en compte, mais elle n'est même pas consultée. Et qui a demandé aux petites communes comment elles allaient se débrouiller avec un personnel réduit et des dotations diminuées ?

Des économies contre la population

Le « moratoire sur les normes », autrement dit le coup d'arrêt à la complexité administrative croissante, est la énième tentative en ce sens. Les journalistes se sont fait une joie de retrouver les discours de prédécesseurs de Jean-Marc Ayrault disant exactement la même chose. Messieurs Boulard et Lambert, auteurs du rapport « L'inflation normative » remis le mois dernier au président et inspirateurs de sa soif de simplification, ont même retrouvé une note de Clemenceau datée de mars 1917. Ce dernier promettait alors quasiment le peloton d'exécution aux fonctionnaires qui multipliaient la paperasse.

Les rapporteurs ont évidemment beau jeu de raconter comment un texte protégeant une espèce rare d'escargot a permis de retarder la construction d'une route, ou comment le changement des règles du basket obligeait toutes les municipalités à repeindre à grands frais leurs parquets de gymnase. Mais les simplifications proposées par le rapport vont toutes dans le sens des économies sur le service public.

Ainsi, constatant que les services d'archéologie préventive peuvent retarder des travaux routiers, le temps d'estimer la valeur des sites mis au jour et éventuellement de les fouiller, le rapport propose de laisser la décision au préfet, « défenseur de l'intérêt général ». Un préfet sera certainement plus sensible aux arguments de Vinci ou de Bouygues qu'à ceux d'un spécialiste de l'habitat mérovingien. Et en quoi est-ce là l'intérêt général ?

Réduire les services

Les rapporteurs décrivent aussi le « parcours du combattant » d'une municipalité qui veut prolonger le CDD d'employés donnant satisfaction. Il est certain qu'il serait plus simple que les collectivités territoriales puissent embaucher qui elles veulent, au tarif et pour la durée qu'elles veulent. Et même, tant qu'on y est, de se passer de code du travail...

De même, Lambert et Boulard déplorent qu'une norme impose le ramassage des ordures, porte à porte, au moins une fois par semaine et à date fixe. Ils proposent donc une plus grande souplesse, qui inciterait la population à faire plus attention à ses déchets, à les trier, à les gérer. Pourquoi pas, si cela ne servait pas au final à arrondir la cagnotte de Veolia et autres sociétés spécialisées dans le traitement des déchets ?

Ce rapport, comme le peu que l'on connaît aujourd'hui des projets gouvernementaux, incite d'une part à laisser les mains plus libres à l'État pour qu'il tranche plus rapidement en faveur des puissants et de l'autre à réduire les services qu'il est censé rendre à la population.

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