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- Lutte ouvrière n°2331
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Editorial
Opposer la force des travailleurs à la dictature du grand capital
Dix mois de gouvernement socialiste ont suffi pour faire la démonstration que, de Sarkozy à Hollande, c'est du pareil au même. Les mêmes attaques contre les travailleurs, les retraités et les chômeurs, les mêmes cadeaux aux riches, la même incapacité à s'opposer aux licenciements, la même servilité vis-à-vis du grand patronat.
À une différence près : Sarkozy n'a jamais caché qu'il était dévoué corps et âme aux riches. Hollande, lui, a fait mine de s'en prendre à la finance et s'est fait élire par l'électorat de gauche. Par les électeurs du PS, son parti, mais aussi par toute la gauche réformiste, du PCF au Parti de gauche de Mélenchon. Ces formations, tout en se vantant de leur rôle dans l'élection de Hollande, se placent aujourd'hui dans une demi-opposition. Elles ont cependant leur responsabilité dans l'escroquerie qui a consisté à présenter l'un des camps de politiciens de la bourgeoisie comme étant plus favorable aux travailleurs, alors qu'on voit bien aujourd'hui que c'était un mensonge grossier. Cela contribue à la démoralisation de leur propre électorat.
Seuls les plus naïfs ont pu espérer que le numéro de comédien de Hollande, à la télévision, apporterait quoi que ce soit aux salariés, aux retraités et aux chômeurs. « La courbe du chômage sera renversée en fin d'année 2013 », a-t-il affirmé ! Outre qu'il n'en sait rien, c'est une façon de dire que d'ici là le chômage continuera à s'aggraver.
Hollande a annoncé une nouvelle attaque contre les retraites. Les salariés devront cotiser plus longtemps pour toucher une pension qui se réduit. Ce 1er avril, est entrée en application la décision de détacher le montant des retraites complémentaires des hausses de prix, ce qui se traduit par un recul du pouvoir d'achat des retraités. Et le pouvoir d'achat diminue aussi pour toutes les familles ouvrières, même quand on a un salaire stable : chacun le constate en faisant ses courses.
Hollande n'a aucune prise sur la vie économique, il n'a aucun poids sur le grand patronat, sur les banquiers, qui dirigent l'économie, et surtout il ne veut pas en avoir. Son rôle est, au contraire, de justifier la politique qui lui est dictée par le grand patronat, de la faire passer pour la seule politique possible. Son rôle est de faire passer pour une vérité absolue que l'économie doit être compétitive, ce qui, dans le langage patronal, signifie qu'il faut que les travailleurs acceptent la flexibilité, les réductions de salaire. Son rôle est de présenter le remboursement de la dette de l'État aux banquiers comme une nécessité, alors que cette dette a été faite pour sortir les banquiers de la faillite qu'ils ont eux-mêmes provoquée par leurs spéculations.
Avec Hollande, les travailleurs font, une fois de plus, l'expérience qu'ils n'ont rien à attendre des dirigeants de l'État, quelle que soit leur couleur politique. Une équipe politique n'est acceptée à la tête de l'État qu'à condition qu'elle soit dévouée à la bourgeoisie, surtout la grande, et à ses intérêts.
Il en est toujours ainsi dans le système capitaliste où, si les hommes politiques occupent le devant de la scène, c'est l'argent qui commande, c'est-à-dire ceux qui en disposent. Comprendre cette vérité-là est le début de la conscience de classe.
Mais la bourgeoisie a bien d'autres pantins dans ses réserves. Les uns brandissent le drapeau réactionnaire du FN. D'autres prétendent critiquer Hollande sur sa gauche, mais sans oser s'en prendre au grand patronat, au système capitaliste. L'espoir pour les travailleurs n'est pas de jeter les marionnettes usées de la bourgeoisie pour en prendre de nouvelles. Il n'est pas non plus de se détourner de la politique. Aux nuances politiques qui se placent sur le terrain du capitalisme, il faut opposer une autre politique, qui oppose la classe ouvrière à son ennemi social : la classe capitaliste qui vit de l'exploitation. Il faut une autre politique, qui ait pour objectif de préserver les intérêts de ceux qui travaillent.
Et aujourd'hui, cette politique signifie imposer l'interdiction des licenciements et l'indexation des salaires et des retraites sur les hausses de prix.
Les confédérations syndicales, qui prétendent défendre les intérêts des salariés, sont loin d'avancer ces objectifs de lutte. Elles privilégient toutes la politique de négociation, alors même que le patronat ne veut rien négocier. Certaines proposent cependant une journée de grèves et de manifestations pour le 9 avril. Il faut y participer, ne serait-ce que pour leur dire que leur devoir serait de proposer aux travailleurs une stratégie de luttes.
Au-delà du jeu des pantins de la politique ou de la couardise des confédérations syndicales, les travailleurs représentent une force sociale, seule capable de s'opposer à la dictature du grand capital. Nous devons apprendre à nous en servir.
Éditorial des bulletins d'entreprise du 1er avril