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- Lutte ouvrière n°2355
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Dans le monde
Cinq ans après la faillite de Lehman-Brothers : D'une crise à l'autre...
Les gouvernements se sont alors portés au secours de leurs banquiers avec l'argent des contribuables et, à coups de milliards, leur ont sauvé la mise, faisant exploser les déficits et l'endettement des États. Et plaçant du même coup les États les plus vulnérables sous la coupe des spéculateurs.
Les États à la rescousse
Mais la crise des banques, qui les avait rendues incapables de jouer leur rôle dans le financement de l'économie, plongea le monde dans la récession. Sous prétexte de les inciter à faire à nouveau crédit aux entreprises et aux ménages pour favoriser la fameuse reprise, les banques centrales – américaine, européenne, britannique et japonaise – prirent le relais des gouvernements en leur fournissant, gratuitement ou presque, des milliards de dollars, d'euros, de livres ou de yens. Depuis un an, la Réserve fédérale américaine achète chaque mois pour 85 milliards de dollars de titres divers. D'après la presse, depuis le début de la crise, elle aurait ainsi injecté 3 000 milliards de dollars sur les marchés financiers. Plus modestement, si on peut dire, la Banque centrale européenne (BCE) a prêté en 2012 aux banques européennes 1 000 milliards d'euros pour trois ans à 1 %. Un argent qui n'est soumis à aucune condition, ni à aucun contrôle, et dont les banques peuvent donc faire ce qu'elles veulent.
Depuis 2008, écrit le journal Les Échos, « la grande finance a retrouvé ses profits, mais la croissance, elle, reste en berne ». C'est qu'au lieu de financer l'économie, les milliards versés par les banques centrales ont continué essentiellement à alimenter la spéculation, au gré des opportunités sur les monnaies, sur les actions, sur les matières premières, sur la dette des États, etc. Tout, sauf l'économie réelle.
Les banques « de l'ombre »
Les banques semblent donc sorties d'affaire. Mais nombre d'entre elles sont loin d'avoir soldé les comptes de la crise. Récemment, la presse faisait état du fait que les banques européennes « abritent dans le secret de leurs bilans, de nombreux actifs douteux hérités des excès du milieu des années 2000 ». Ces actifs douteux représenteraient de l'ordre de 1 000 milliards d'euros, et constituent une véritable bombe à retardement, qui peut éclater d'un moment à l'autre.
Depuis 2008, d'un G7 ou d'un G20 à l'autre, les dirigeants des États impérialistes ont multiplié les promesses de régulation destinées à empêcher les banquiers spéculateurs de nuire : on allait voir ce qu'on allait voir ! On n'a rien vu, ou presque. Face à la pression des banquiers, tous, d'Obama à Hollande en passant par Sarkozy, ont reculé. Les banques gardent donc les coudées franches.
Il faut dire qu'une grande partie des opérations bancaires échappe de toute façon à toute régulation : il s'agit des activités des banques dites « de l'ombre », organismes financiers qui réalisent leurs opérations « de gré à gré », directement de banquier à banquier, sans passer par les marchés dits réglementés – comme les Bourses de valeur, par exemple – et donc en se soustrayant au contrôle des autorités bancaires. À la fin 2011, leurs actifs représentaient 67 000 milliards de dollars, soit l'équivalent de la moitié des actifs des « vraies banques », c'est-à-dire des banques ayant pignon sur rue. Avec la crise, et, surtout, avec les menaces de réglementation du système bancaire, ce secteur incontrôlé de la finance ne peut que croître. « Plus la transparence se fait sur les banques officielles » – écrit le journal Les Échos – « plus prospèrent ces établissements opaques ». Il faut dire qu'entre celles-ci et celles-là, il y a plus que des vases communicants : de multiples liens.
Pour rester dans l'ombre, l'existence de ces organismes financiers pirates n'en est pas moins connue et n'est pas contestée par les autorités. Comme n'est pas contesté le fait que c'est dans une large mesure leurs opérations de spéculation sans contrôle – à base de titrisation, de produits dérivés, et autres produits financiers sophistiqués – qui sont à l'origine de la crise des subprimes de 2007-2008 et de la crise bancaire qui en a été la conséquence.
Cinq ans après la faillite de Lehman Brothers, tous les commentateurs – professionnels de la finance ou journalistes – reconnaissent que la crise qu'elle a ouverte est loin d'être terminée. Toutes les conditions sont réunies pour qu'éclate à nouveau une nouvelle crise qui prolonge et aggrave celle de 2008, pour les mêmes raisons et avec les mêmes responsables, les banquiers.